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UOrdo Virtutum de Hildegarde de Bingen'
Nous écarterons ici les débats sur Ie genre et les sources de VOrdo Virtutum, dont les conclusions pourraient frustrer Ie lecteur: les oeuvres d'Hildegarde de Bingen sont pour Ia plupart irrémédiablement originales... Ni moralité —du moins sous ses aspects traditionnels^, ni drame liturgique, VOrdo Virtutum emprunte néanmoins directement aux formes liturgiques elles-mêmes, dans Ia composition. C'est peut-être là un de ses premiers enjeux que cette volonté manifeste de représenter et de magnifier Ie chant de Ia louange divine, (à travers cette même louange), et de ceux qui l'entonnent. Ces vertus, en effet, se font tantôt Ia voix des âmes soupirant après Dieu, tantôt, en tant qu'attributs divins, celle de l'appel aux «filles de Sion», et de leur glorification. Ce jeu a été joué et chanté au monastère du Rupertsberg. NuI doute qu'il ne s'inscrive dans un contexte d'intime réjouissance; c'est, pour ces moniales, une célébration de leur propre état. Hildegarde inclut postérieurement YOrdo Virtutum dans ses Symphonia harmoniae caelestium revelationum, et en effet cette oeuvre est tout sauf un sermon de type allégorique. Chant de Ia beauté divine, enseignement théologique complet et poussé, emprunt de prophétisme, ce court texte illustre de manière particulièrement sensible Ie lien entre poésie et intuition théologique mis en lumière par M. A. Michel 2 . Très proche du Scivias, au point de lui emprunter des passages entiers, cet enseignement se construit tout entier ici autour de Ia
1 Résumé d'un mémoire de D.E.A. soutenu à Nantes sous Ia direction de J. Pigeaud. 2 A. Michel, «Rhétorique, poétique et théologie dans Ie latin médiéval», Helmantica4(i (1989) 115-131.
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