|
du pouvoir spirituel littéraire
Fragment d'un enseignement sur Chateaubriand
Les Martyrs, allégorie
Les Martyrs sont une épopée en prose; c'est un roman his-
torique, c'est une fiction poétique. Mais c'est aussi un acte politique, comme l'était déjá le Génie: si le Génie du christianisme, en 1802, appuyait la politique de restauration catholique du Premier consul, les Martyrs en 1808 manifestent, sous le voile de la fiction, la rupture de Chateaubriand avec l'Empereur. Un ami de Chateaubriand, Joseph Joubert, a écrit que «la politique est poésie». Á cette poésie de la politique, oú Napoléon est passé maitre, Chateaubriand répond par une politique de la poésie qui désabuse ses lecteurs de l'emprise exercée sur eux, au titre de sujets de l'Empereur, par la poésie de la politique. Á bien des égards, l'auteur des Martyrs retrouve les positions et propositions de Pascal sous Louis XIV, dans les fragments des Pensées qui touchent á la conscience chrétienne face aux pouvoirs. Joubert est un pur contemplatif; quand il parle de poésie de la politique, il veut dire par lá que l'emprise de l'homme d'État sur l'imagination et sur le réve est indispensable á son ascendant sur les esprits, elle lui attache plus súrement les yolontés que le cynique appel au calcul des intéréts bien compris ou que la force nue. Homme d'État poéte, Bonaparte le fut sans nul doute, avec une exceptionnelle capacité de réveiller et réactualiser chez les Franois de son temps les grands universaux de l'imaginaire et les émotions d'amour-propre qui peuvent s'y rattacher: jI fit
|