|
Nicolas Rouche: In Memoriam
NICOLAS ROUCHE1: IN MEMORIAM
«7. Les mathématiques sont une face de la pensée 2 Quoi qu’il en soit, ne suffit-il pas d’avoir vu un élève une seule fois se mettre à penser et agir sur un chantier de problèmes à sa portée pour savoir que la pensée mathématisante est latente dans son esprit? Et le grand nombre de fois où l’on constate un éveil de ce genre, fut-il éphémère, n’incite-t-il pas à croire que la pensée mathématisante est latente dans tout esprit ? Et enfin, n’est-ce pas parce que l’imagination et la logique appartiennent à l’essence même de la pensée que celle-ci, sollicitée du côté des figures et des nombres, et non entravée par ailleurs, se met à esquisser des mathématiques? Si ces affirmations ne sont que vraisemblables, si elles paraissent, par nature, impossibles à prouver, n’importe-t-il pas néanmoins, pour chaque personne et pour la société, d’en faire le pari? Si l’on accepte ces conclusions, les mathématiques n’ont rien d’une discipline à part, située à côté de la pensée commune, et qui pourrait faire l’objet pour certains d’un supplément d’instruction. Elles sont, pour ainsi dire, une face de la pensée. Il n’y a pas des esprits concrets à côté des esprits abstraits. Toute pensée est conceptualisante par nature et encline aux mathématiques. Mais alors, la réponse à la question «Enseigner les mathématiques, pour qui? Pourquoi?» devient évidente. De quel droit amputerait-on, par défaut d’enseignement, la pensée de quelqu’un de sa face mathématique? Ne pas éduquer mathématiquement un enfant, c’est mutiler, défigurer sa pensée. Il faut enseigner les mathématiques à tous. Avec une restriction majeure: tout citoyen a le droit d’être préservé des mathématiques réduites au sens étroit. Tout citoyen à droit au sens, dans l’acception la plus pleine du mot.» ***
1 2
Miembro del Consejo Asesor de la Revista Papeles Salmantinos de Educación. N. Rouche In Faire des mathématiques: le plaisir du sens, Armand Colin 1991, pages 153-154.
13
|