|
IMMATERIALITE DE L'INTELLECT ET IMMORTALITE DE L'AME HUMAINE SELON FRANCISCO SUAREZ
La réflexion de Suarez sur l'immortalité de l'âme humaine, développée dans les chapitres 9, 10, 11 et 12 du livre 1 de Ia dernière rédaction du traité De l'Ame, présente Ia particularité d'être sans doute Ia dernière réflexion de Suarez en ce.monde. En 1617 en effet, Suarez avait entrepris de réécrire Ie traité De l'Ame qu'il avait composé dans sa jeunesse, probablement en 1573 alors qu'il enseignait Ia philosophie à Ségovie. Il eut Ie temps de réécrire les douze premiers chapitres avant d'etre, Ie 11 septembre, interrompu dans son travail par Ia maladie, n mourut Ie 25 septembre 1617. Les chapitres 9, 10, 11 et 12 sont donc ses derniers écrits et Us concernent tous l'âme humaine et son immortalité. Les conclusions de Ia part philosophique de cette réflexion sont assez positives. Suarez pense qu'avant même toute démonstration 1 nous possédons des signes nombreux et certains de notre immortalité . La philosophie transforme ces signes en preuves. Mais Suarez estime que, parmi les preuves philosophiques ainsi obtenues, seules deux sont des «démonstrations suffisantes en eUes-mèmes»: une des preuves morales et Ia preuve par l'immatériaUté de l'opération de l'inteUect2. C'est cette dernière argumentation que je voudrais présenter aujourd'hui. Devant être bref, je Ie ferai en présentant souvent Ie raisonnement de Suarez de manière abrégée et en donnant peu de références. Dans une étude un peu plus développée, qui paraîtra bientôt, je suivrai de plus près son raisonnement et je donnerai les quelques deux cents références nécessaires pour que Ie lecteur de Suarez puisse retrouver dans son oeuvre tous les moments de l'argumentation. La preuve par l'tmmatériaUté de l'opération de l'inteUect ne prétend pas démontrer que l'âme humaine ne peut être anéantie d'aucune façon. Une teUe démonstration serait d'aiUeurs, selon Suarez, impossible, puisque l'âme humaine, comme toute créature, est constamment soutenue dans l'être par Ia libre volonté de Dieu et qu'il suffit que Dieu cesse de Ia soutenir dans l'être pour qu'eUe s'anéantisse aussitôt. La preuve par l'immatérialité de l'opération de l'inteUect veut seulement démontrer que l'âme humaine ne peut subir Ia mort ou corruption3. La mort ou corruption est cet anéantissement qui résulte de Ia division d'une
1 D.A., 1. 1, c. 10. n. 38. 2 DA., 1. 1, c. 10, n. 35. 3 D.A., 1. 1, c. 10, nn. 18 et 23.
|