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Il y a Grecs et Grecs! Quel sens donner au prétendu antihellénisme de Pline?
Depuis deux siècles, Pline est Ia victime de plusieurs procès, parfois si injustes que l'on a envie, comme Ie disait plaisamment F. Delia Corte ', de s'instituer «avocat d'office» pour lui obtenir au moins des circonstances atténuantes. Par exemple, pour son style, on s'en tient souvent au verdict sévère de Norden. Ainsi F, R. D. Goodyear2: c'est catastrophique, il n'y a pas une phrase cohérente! (Et pourtant les pages splendides ne manquent pas dans l'Histoire Naturelle, qu'il s'agisse du vol des pigeons ou du chant du rossignol, ou encore des nuances délicates des pierres précieuses). Pour Ie fond, on lui reproche d'ordinaire une infinie crédulité, en répétant après W. Kroll (RE) que sa règle paraît être: credo quia absurdum. Il faudrait sans doute Ie lire de beaucoup plus près, avant de trancher; très souvent Ia mention d'un auctor, même anonyme (dicunt), exprime Ia distance qu'il établit entre les faits rapportés et son opinion personnelle. Il y a même parfois, à l'évidence, un humour, une ironie de Pline qu'un oeil attentif peut aisément déceler. Mais c'est un autre dossier que nous voudrions aborder: Pline serait un chauvin, animé d'un anti-hellénisme systématique. Cette accusation assez ancienne a repris de l'actualité, pour avoir été formulée d'une façon très cohérente et très radicale par Gerhardt Grüninger 3 . Selon ce savant, Ie Graecos insectari de Ia Praefatio ne doit pas être pris à légère (comme y invite effectivement Ie contexte: il s'agit seulement du choix d'un titre); il faut
1 Au colloque de Come, pour Ie 19° centenaire de Ia mort de Pline. 2 Cambridge History of classical literature (1982) II, pp. 270-72 3 Dans sa thèse (Friburg en Brisgau 1976).
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