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Dialogue philosophique et vie intérieure: Cicéron, Sénèque, Saint Augustin
On a étudié Ie dialogue philosophique à Rome du point de vue des sources littéraires et de l'évolution des formes, en se référant surtout aux modèles grecs >. Nous voudrions ici examiner en elle-même l'évolution du dialogue romain et mener cette étude sans nous limiter à Ia forme, mais en examinant Ie rapport qui existe dans cette expérience si originale entre les mots et les choses. La rhétorique du dialogue dépend évidemment de Ia sagesse qu'il veut mettre en oeuvre. D'une autre façon, on peut dire aussi qu'elle est à Ia source de cette sagesse. Heidegger, citant un vers de Hölderlin, a montré que Ie dialogue appartient à l'essence même du langage 2. Il n'y a pas de langage sans une intention de dévoilement, qui nous mène vers autrui. Nous voudrions montrer ici, en confrontant rhétorique et philosophie dans Ie dialogue, que les écrivains romains ont vécu avec profondeur cette expérience fondamentale. On parle aujourd'hui volontiers de dialogue au sens poli tique, pour signifier l*esprit de non-violence et de compréhension mutuelle. Cela est fort important. Mais on peut aller plus profond, jusqu'au plan de Ia réflexion linguistique ou métaphysique.
1 R. Hirzel, Der Dialog, I (Leipzig 1895); M. Ruch, Le préambule dans les oeuvres philosophiques de Ciceron (Paris 1958) (qui dégage mieux les différents aspects du problème; cf. du même auteur: 'La disputatio in utramque partem dans Ie Lucullus et ses fondements philosophiques', REL 47 (1969) 310-34). Nous avons étudié Ie style des dialogues cicéroniens dans: 'Rhétorique et philosophie dans les traités de Cicéron', Aufstieg und Niedergang der römischen Welt, I, pp. 139-208. 2 Hölderlin und das Wesen der Dichtung, à propos de Ia formule: «depuis que nous sommes un dialogue« (Hölderlin, éd. Norbert von Hellingrath, IV, 343).
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